moi, j'habite dans une ville dortoir et mes potes sont loin, maintenant. c'est pas tant qu'on s'ennuie mais y'a rien pour tromper le vide. pendant une réunion, quelqu'un en costume m'avait demandé de trouver quelque chose qui apporterait aux gens autour de moi; le reste, j'ai pas trop écouté, parce que son bureau avait une vue sur une ligne électrique qui disparaissait derrière l'horizon, et je me demandais où elle allait. elle a monologué pendant un moment, puis j'ai seulement répondu que je voulais parler aux chats qui passent derrière la librairie. on s'est jamais revus après ça.
aujourd'hui, pas mal de monde s'est réuni sur le terrain vague pour écouter le Facteur raconter les nouvelles du monde. il est pas de passage très longtemps parce qu'il doit s'en aller pour informer d'autres villes, alors on voit sortir, juste pour lui, des gens un peu mystérieux. le Facteur nous a dit que Dieu était revenu en ville après ses vacances, que tout allait bien et qu'il pleuvrait demain, puis pour les 12 semaines qui suivront.
il n'y a pas grand chose à faire à la maison (c'est ce que j'aime bien). j'ai fini les restes d'hier soir et le café d'encore avant, qui avait prit un goût du plastique trempé par la pluie et et sali par les chaussures des passants (même si je n'en suis pas sûr totalement). la journée s'est terminée après avoir arrosé mes fleurs et cueilli les quelques légumes mûrs par-ci, par-là. j'étais tellement fatigué qu'ensuite je me suis endormi dans la pelouse un peu humide (c'était supportable, parce que le soleil brillait encore).
le jardin n'est pas très grand, une dizaine de mètres de large, maximum. il est décoré avec des statues de chimères qui trônent au fond, près de la clôture. elles étaient déjà installées ici à mon eménagement alors je les garde comme une marque de l'ancienne vie de la maison. lorsque je me suis réveillé, à un moment où le soleil commence timidement à se lever, les statues me regardaient. lorsque j'ai essayé de me lever, les statues m'ont demandé "À quoi nous sers-tu ici ?". lorsque j'ai essayé d'avancer, les statues ont ajouté "Nous parlons pour la maison : la maison ne veut plus de toi. Nous te laissons rester ici malgré l'esprit de la maison et nous ne recevons rien". lorsque j'ai essayé de leur demander quoi faire, les statues m'ont interrompu "C'est à toi de trouver. Nous faisons des efforts pour te laisser rester ici, montre nous que tu sais rendre ces efforts". lorsque j'ai réalisé que tout ceci m'était déjà arrivé avant, les statues n'ont rien dit. lorsque je suis retourné me reposer, les statues ne me regardaient plus.
gris, le ciel est gris, alors dans ma maison il fait gris. j'me sens gris, enfin. des titans de pierre sont passés dans le lointain,à mi-chemin entre le champ de fleurs et l'horizon final : ils fuient les tempêtes qui attaquent leurs falaises. ça veut aussi dire que les 12 semaines de pluie deviennent d'un coup une éternité de tourmentes. j'attendrais à l'intérieur de la maison que tout ça se calme. en vérité, j'attends déjà. 2 jours, chez moi, dans mon canapé, je ne me sens plus vivre. j'ai mis 2 heures pour formuler cette simple pensée apparemment..
un lapin est rentré à la maison par l'entrée du garage où il n'y a pas d'obsatacle pour le gêner; le lapin s'est progressivement rapproché de moi, et je le regardais faire. ça m'ennuie de devoir faire ça, parce que je suis terriblement fatigué, mais je me penche du canapé pour tendre la main au lapin. il s'en passe du temps, où nous restons immobiles. comment est-il arrivé chez moi ? ça servirait à rien de chercher : c'est bien au dela de ma portée. toutes ses décisions l'ont menés jusqu'à ce moment, et aussi à celui d'après, et encore, et encore.. je ne connais presque rien de ce lapin, celui-ci avance doucement vers mes mains. je le prends, le pose sur le canapé. il fait toujours gris dehors mais maintenant, à côté de moi, il y a le lapin.
les jours passent, nous perdons notre temps ensemble. enfin à proprement parler, non. j'estime ne pas être en train de perdre mon temps. dehors il n'y a rien à faire et ici non plus, alors je n'ai pas vu de souci à contempler chaque recoin de cette maison (collection infinie de natures mortes), demi-heure après demi-heure, parce que l'état d'une chambre, d'une ruelle, d'une bibliothèque, d'une place vide ou d'une place animée, en fait l'état de tout illustre la vie qui y est passée et.. enfin j'aime bien. (quelque chose manque, non ?)
il a déjà plu pendant 8 semaines 3 jours et on s'emmerde mais ça va. j'ai écrit une lettre à Eve pour lui proposer d'aller faire quelque chose une fois que les tourmentes seront finies. et puis, une poignée de secondes après avoir fini la lettre, je la déchire. de toute façon c'est la 8ème, c'est plus si grave.
normalement il ne reste plus que deux jours de pluie et pourtant il me semble qu'il pleuvra pour toujours; le repos quant à lui, doit sûrement m'attendre juste après. oh ! et puis, le lapin s'est en allé. c'était assez prévisible pour être honnête. je n'aurai pas pû comprendre un animal. le lapin est beau, le lapin est doux, le lapin est bon mais l'humain ne comprends pas un lapin comme il se comprend lui. l'horloge indique qu'il est 13 heures. hier soir, je me suis endormi sur le canapé, dans mes vêtements de jour. je ne trouve pas ça très confortable mais je vais quand même rester là encore un moment..
ça ne sera sûrement pas très clair.
très souvent, lorsque je marche, aucun souvenir de mon trajet ne me reste en mémoire. hm. mon corps lui marche mécaniquement sans problème mais mon esprit n'y est pas. avant que je m'en sois même rendu compte, j'ai traversé un pâté de maison. enfin tout ça pour dire que sans m'en rendre compte, je suis retourné voir la machine de l'autre jour, puis le cabinet cassé qui lui servait d'alimentation. pour quelque raison, je suis aussi allé le réparer. une détonation de mort sonna dans les alentours. de retour à la machine, celle-ci affiche un message : "tout va mal". ce n'est pas ce que disait le facteur. c'est bizarre.